« L’idée de l’Iméra c’est l’interdisciplinarité pleine et entière, bien au-delà des sciences humaines (…) d’abord le fait qu’il fallait une conception de l’interdisciplinaire très large, le plus large possible ; ensuite qu’il fallait se centrer sur les conceptions du monde et les modes de vie des chercheurs »

Robert Ilbert, fondateur de l’Iméra
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Entrée de la Maison des Astronomes, bâtiment historique (dont la façade est apparente au second plan), siège de l’Iméra, Institut d’études avancées (IEA) d’Aix-Marseille Université. L’entrée est située sur la Place Leverrier au 4ème arrondissement de Marseille. Crédit : Timothée Andonian / Iméra

Contexte de la création de l’Iméra

Dans la décennie 2000, la création de l’Institut d’études avancées d’Aix-Marseille (Iméra) répond à deux grands objectifs de plus en plus essentiels dans le paysage européen de la recherche : son internationalisation et le développement d’une pensée interdisciplinaire alors à ses prémisses. Tant le processus de la définition de l’Iméra que son projet final s’appuient sur des rencontres humaines et institutionnelles marquantes avec comme pari l’expérimentation d’un nouveau type de lieu de savoir.

D’abord perçue comme utopique, la possibilité d’un institut d’études avancées dans la métropole d’Aix-Marseille a germé dans l’esprit visionnaire de l’historien de la Méditerranée Robert Ilbert, fondateur de la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (MMSH). Le cadre de réflexion est aussi national, concomitant de la mise en place du Réseau français des instituts d’études avancées (RFIEA), né en 2006 et soutenu par le Ministère de l’enseignement supérieur, dont l’Iméra devient membre en 2007. Le RFIEA vient offrir un cadre de référence, de visibilité internationale et un levier puissant pour de futurs projets conjoints aux instituts d’études français membres, qui tous émergent dans ces années (Nantes, Lyon et Paris).

Robert Ilbert fondateur de l'Iméra dans une conférence de l'Institut du Monde Arabe
Robert Ilbert (gauche) s’adressant au public des  » Rendez-vous de l’Histoire du monde Arabe  » – Institut du Monde Arabe – 5 Juin 2015

Les premières orientations scientifiques de l’Iméra

Le 31 mai 2007, le projet de l’Iméra – alors désigné comme futur Institut Méditerranéen de Recherches Avancées d’Aix-Marseille – est officiellement confirmé en tant qu’association de préfiguration issue d’une alliance étroite entre le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et les trois universités locales (Université de Provence, Paul Cézanne et de la Méditerranée) avant leur fusion en 2012. Ce statut offre notamment les conditions favorables à la mise en place, entre 2007 et 2009, d’un projet scientifique qui s’intéresse à « la dimension humaine des sciences ».

Le sujet inaugural consiste en « l’observation des crises » dans une série de rencontres à huis clos, animées par un collectif de scientifiques et d’artistes, et de rencontres publiques. La diversité des profils associés témoigne d’une grande ouverture à l’ensemble des moyens d’explorer le réel. L’Iméra s’affirme ainsi comme un véritable lieu de recherche : deux pôles sont créés, offrant des horizons complémentaires pour l’étude des crises, entre lesquels sont répartis les chercheurs en résidence : d’un côté, le pôle Arts, sciences, instrumentations et langages (ASIL) ; de l’autre, le pôle Méditerranée.

C’est dans ce contexte que le premier appel à candidatures de l’Iméra est lancé en 2008-2009 à l’issue duquel les sept premiers résidents sont sélectionnés.

Visages des premiers chercheurs en résidence à l’Iméra.

La fusion des trois universités du site d’Aix-Marseille le 1er janvier 2012 est déterminante pour la pérennisation de l’Iméra, en 2013, comme fondation universitaire d’Aix-Marseille Université (AMU). Ce tournant marque la reconnaissance de l’institut comme University-based Institute for Advanced Study (UBIAS), statut qui lui permet de rejoindre le réseau mondial du même nom en 2018, faisant suite à l’intégration dans le réseau européen des Instituts d’études avancées (NETIAS) en 2016 : il est relié aux centres de recherche des universités du site, mais en même temps disposant de sa propre politique scientifique.

L’université désormais multi-site englobe presque l’ensemble des disciplines, lui conférant un formidable avantage dans l’approche de problématiques scientifiques complexes que seule l’interdisciplinarité peut permettre de résoudre. A cet endroit, l’institut joue un rôle de premier plan dans la structuration de cette immense université par l’interdisciplinarité car il offre des occasions de rencontres entre des chercheurs de laboratoires du site d’Aix-Marseille aux spécialités très diverses, et leur fait bénéficier de l’expertise des résidents internationaux qu’il accueille.

Ces rencontres se font notamment dans le cadre de cycles de séminaires intersectoriels, ouverts également aux doctorants : après le sujet de la crise, de nouveaux objets transversaux fédérateurs caractérisent l’orientation scientifique de l’Iméra comme les frontières ; les réseaux, systèmes complexes et leurs dynamiques.

Une structuration par programmes scientifiques

A partir de 2016, la politique scientifique de l’institut s’articule autour de programmes de recherche : « Arts, sciences et sociétés », « Méditerranée », « Regards croisés : explorations de l’interdisciplinarité », « Phénomènes globaux et régulations », les trois premiers étant inscrits dans les statuts de la fondation tandis que le quatrième change en fonction du directeur scientifique, devenu en 2021-22 « Utopies nécessaires ».

L’accueil des chercheurs internationaux, qui restent leur objectif principal, se fait désormais de plus en plus dans le cadre de chaires partenariales thématiques, co-financées et co-animées avec des centres de recherches locaux et des organismes scientifiques et culturels nationaux et internationaux, outils privilégiés pour asseoir des collaborations durables.

L’équipe franco américaine FOS Epseal dirigée par Prof. Barbara Allen, ancienne chercheure en résidence à l’Iméra, 2013-2014 (à droite de l’image), mène depuis 2013, une étude sur les questions de santé et environnement dans la zone industrielle de l’étang de Berre. Crédit photo : https://www.portsaintlouis.fr/

De 2016 à aujourd’hui, l’activité d’un programme donné s’articule typiquement autour de cycles annuels, des activités d’une ou plusieurs chaires, et d’autres événements montés par les résidents en collaboration avec des chercheurs/institutions d’Aix-Marseille Université ou externes au site. Les collaborations avec le site prennent des formes très diverses, allant du colloque au groupe de recherche en huis clos, en passant par des conférences-performances d’artistes et des forums.

Membres de l’Atelier de recherche Travail et Libertés (ArTLib) créé en 2019 à l’Institut d’études avancées d’Aix-Marseille Université (Iméra).

Toujours plus aligné avec les standards internationaux des instituts d’études avancées, l’Iméra se dote d’un véritable Community Building Seminar hebdomadaire qui réunit l’ensemble des chercheurs en résidence, tous programmes confondus, et l’équipe scientifique.

Entre 2019 et 2022, les formats de résidences se diversifient : outre le format le plus courant de la résidence annuelle de 5 ou 10 mois auquel on candidate via l’appel général annuel, l’Iméra met en place des résidences pluriannuelles, permettant à ses titulaires de monter des collectifs interdisciplinaires autour de leurs problématiques de recherche, et des résidences de congé-recherche à destination des enseignants-chercheurs d’Aix-Marseille Université, permettant de renforcer les ponts avec la communauté locale.

Photo du premier CBS de l’année académique 2022-23. Crédit photo : Timothée Andonian / Iméra.