Crédit : Andonian Timothée / Iméra

Watkins Kate

Disciplines : NeurosciencesPsychologie
Poste et institution de provenance : Maîtresse de conférences en neurosciences cognitives, Dept. de psychologie expérimentale et Tutorial Fellow en psychologie, St Anne’s College, University of Oxford
Type de résidence : Résidence de recherche
Chaire : Chaire ILCB / Iméra – Langage, communication et cerveau
Programme de recherche : Explorations interdisciplinaires
Période de résidence : Septembre 2022 – Mars 2023
Entretien avec Kate Watkins, chercheuse en résidence à l’Iméra (2022-23)

Projet de recherche

« Time to Speak » : enquête sur la synchronisation des mouvements de la parole chez les personnes qui bégaient

Résumé du projet

Le bégaiement développemental affecte la fluidité de la parole et se caractérise par des répétitions ou des prolongations de sons et des hésitations ou des pauses fréquentes. Les personnes qui bégaient ont été décrites à travers l’histoire, dans toutes les langues et cultures. On estime que le bégaiement affecte au moins 1 % de la population adulte et 5 % des enfants. La difficulté de communication éprouvée par de nombreuses personnes qui bégaient peut limiter la réussite scolaire et entraver l’emploi, entraînant des conséquences socio-économiques négatives pour certaines personnes.

Une caractéristique frappante du bégaiement est que la fluidité totale peut être atteinte immédiatement quoique temporairement en changeant la façon dont une personne perçoit sa propre parole. Par exemple, masquer la production de la parole avec du bruit (ou de la musique forte comme le montre le film The King’s Speech) peut temporairement éliminer le bégaiement. Retarder le retour auditif de la parole, modifier sa hauteur, chanter, parler à l’unisson avec un autre locuteur ou parler à temps avec un métronome sont tous aussi efficaces pour améliorer la fluidité. Que la modification de la rétroaction sensorielle de toutes ces manières améliore le bégaiement nous amène à suggérer que le principal déficit du bégaiement développemental est lié à la difficulté d’intégrer les informations sensorielles et motrices dans le système de la parole. Le déficit pourrait se produire soit dans la modélisation directe moteur-sensorielle, qui prédit les conséquences sensorielles des mouvements d’un individu, soit dans la modélisation inverse sensorielle-motrice, qui met à jour le modèle interne pour tenir compte des erreurs. Le fait que la fluidité complète puisse être immédiatement induite chez les personnes qui bégaient en fournissant un signal externe pour le début de la parole suggère une altération spécifique de la synchronisation interne des mouvements de la parole. Dans le « discours choral », des signaux de synchronisation externes sont fournis par un autre locuteur lisant ou récitant le même texte, et dans le « discours chronométré par métronome », un métronome est efficace pour augmenter la fluidité de la parole pendant la conversation ou la parole spontanée, ce que l’on appelle l’effet de rythme. Les patients atteints de la maladie de Parkinson présentent des avantages similaires pour l’initiation des mouvements à partir de signaux externes qui peuvent être auditifs (rythmes de marche) ou visuels (rayures sur le sol ou les escaliers). Comprendre la relation entre la génération de signaux internes pour initier la parole et l’intégration sensorimotrice constituera une avancée importante dans nos connaissances théoriques sur le bégaiement et le contrôle moteur de la parole plus généralement.

Le projet proposé étudiera comment la synchronisation interne des mouvements de la parole peut être mesurée à l’aide de la magnétoencéphalographie (MEG). Il bénéficiera de l’expertise locale d’Aix-Marseille Université à l’Institut du Langage, de la Communication et du Cerveau (ILCB) dans l’utilisation de la MEG pour l’étude de la parole et plus généralement dans l’étude des bases neurales de la parole et du langage. Étant donné que la production de la parole est un phénomène fondamentalement temporel, une méthode d’imagerie temporelle élevée comme MEG est une technique appropriée pour étudier la dynamique temporelle du signal cérébral. La MEG a l’avantage sur l’IRM d’être une modalité d’imagerie silencieuse, qui est également utile pour les études de perception et de production de la parole. La MEG est particulièrement bien adaptée à la recherche sur le bégaiement car la parole n’est pas masquée par le bruit et il n’y a pas de repère rythmique, les deux (comme indiqué ci-dessus) peuvent temporairement améliorer la fluidité. La préparation et la planification motrices dépendent essentiellement de la synchronisation précise des mouvements à exécuter. Le MEG fournit des informations de synchronisation précises de l’activité cérébrale, il sera donc essentiel pour comprendre les déficits de synchronisation dans le bégaiement. Le but du projet sera de développer un nouveau paradigme qui pourrait être utilisé dans de futures études pour étudier la préparation du mouvement chez les personnes qui bégaient. Les objectifs sont de : (i) étudier la planification et l’initiation des mouvements de la parole dans le bégaiement développemental ; (ii) fournir un examen détaillé des caractéristiques spatio-temporelles des interactions sensorimotrices lors de la production de la parole chez les locuteurs qui sont généralement fluides et ceux qui bégaient.

Biographie

Kate Watkins a suivi une formation en neuropsychologie à l’Institute of Child Health et au Great Ormond Street Hospital for Children de Londres. Sa recherche doctorale a utilisé la neuropsychologie et l’analyse d’images structurelles pour étudier la famille KE, dont les membres affectés ont une mutation du gène FOXP2 et un trouble moteur sévère de la parole. Elle a fait sa formation post-doctorale à l’Institut neurologique de Montréal, où elle a utilisé la TMS pour étudier le rôle du cortex moteur dans la perception de la parole. Elle est à Oxford au Centre FMRIB depuis 2003 et a été nommée maîtresse de conférences en psychologie expérimentale en 2006.

Appels à candidature

Les résidences de recherche que propose l’Iméra, Institut d’études avancées (IEA) d’Aix-Marseille Université, s’adressent aux chercheurs confirmés – académiques, scientifiques et/ou artistes. Ces résidences de recherche sont distribuées sur quatre programmes (« Arts & sciences : savoirs indisciplinés », « Explorations interdisciplinaires », « Méditerranée » et « Utopies nécessaires »).