Crédit : Andonian Timothée / Iméra
Nadia Ali
Projet de recherche
Cultures visuelles en Arabie préislamique (IIe-VIe s.) : revisiter le mythe moderne de « l’arabe sans arts »
Résumé du projet
Au fil des siècles, les musulmans et les érudits ont développé l’idée de l’Arabie préislamique comme une époque d’ignorance « païenne » et d’isolement culturel (jāhilīya). Pourtant, de récentes découvertes d’inscriptions en Arabie saoudite et au Yémen confirment non seulement la présence de juifs (conversion des rois sud-arabes au judaïsme vers 380 après J.-C.) et de chrétiens, mais aussi les liens de la péninsule arabique avec le Levant, la Méditerranée, la Mer Rouge et l’Océan Indien. L’Arabie antique (IIe-VIe s.) est extrêmement riche en structures, artefacts et images (Sanaa, Marib, Shabwa, Qaryat al-Faw, Wadi Dura, Gerrha, Falaika, Nakhlat al-Hamra, Hisn al Urr, Dumat al-Jandal, Zafar) et beaucoup d’efforts ont été et sont toujours consacrés à la documentation des sites et des bâtiments individuels. Cependant, malgré leur importance pour l’histoire de l’Antiquité tardive et des origines de l’Islam, les cultures visuelles de la péninsule arabique demeurent un angle mort de la recherche. Ce projet est la première tentative d’exploration des arts visuels de l’Arabie avant l’Islam (IIe-VIe s.). Il vise à réintroduire les questions de matérialité dans l’histoire des origines de l’Islam. Mes recherches partent du postulat que dans les sociétés prémodernes où l’alphabétisation était rare, les langages visuels et les cultures matérielles ont joué un rôle central dans la formation des identités, la construction des autorités politiques et la constitution des pratiques religieuses.
Biographie
Nadia Ali est une historienne de l’art islamique qui s’intéresse particulièrement à la réception de l’art de l’Antiquité tardive dans l’Islam des premiers siècles, au comparatisme et à l’historiographie critique du domaine. Elle a suivi une formation en histoire de l’art, en études islamiques et en arabe à l’Université d’Aix-Marseille. Son parcours académique et professionnel couvre la France, le Moyen-Orient, les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni. De 2018 à 2020, Nadia Ali a été Faculty Fellow à Silsila : Center for Material Histories in the Islamic World (New York University). De 2013 à 2018, elle a été membre du projet « Empires of Faith », un projet de recherche financé par le Leverhulme Trust et hébergé conjointement par le British Museum et l’Université d’Oxford. Elle vient de terminer son premier livre provisoirement intitulé Qusayr ‘Amra and the Power of Images in Early Islam (VII-VIIIe s.).