Crédit : Timothée Andonian / Iméra
Musaraj Smoki
Projet de recherche
Rêverie Méditerranéenne :
migration et tourisme dans les villes maritimes
Résumé du projet
Le projet de Smoki Musaraj à l’Iméra, institut d’études avancées d’Aix-Marseille Université, explore les dynamiques évolutives des villes méditerranéennes face à l’augmentation de la migration, du tourisme et des mouvements sociaux revendiquant le « droit à la ville ». Le projet vise à comprendre l’avenir de ces villes en examinant les changements démographiques récents, les évolutions de l’urbanisme et les transformations culturelles. Grâce à des recherches ethnographiques multi-sites et médiatiques, Musaraj cherche à éclairer l’impact de la migration croissante et du tourisme sur le paysage urbain ainsi que les différentes visions du nouvel espace méditerranéen perçues par divers publics.
Contexte de la recherche : La région méditerranéenne a été historiquement considérée comme une unité d’analyse, définie non seulement par ses frontières géographiques, mais aussi par son milieu socio-culturel diversifié. Cependant, cette conception a progressivement perdu de son influence en raison des changements géopolitiques, suscitant des inquiétudes quant aux approches essentialistes et orientalistes pour étudier la région. Ces dernières années, un corpus croissant de littérature a ranimé l’intérêt pour la Méditerranée en tant qu’espace marqué à la fois par l’unité et la fragmentation, influencé par les héritages postcoloniaux et les hiérarchies contemporaines créées par la forteresse Europe.
Questions et objectifs de recherche :
Le projet s’attache à plusieurs questions de recherche essentielles afin de mieux comprendre les transformations des villes méditerranéennes :
- Comment l’accroissement des flux migratoires et du tourisme impacte-t-il les villes méditerranéennes contemporaines ? Comment les autorités locales abordent-elles ces mouvements dans leurs politiques de gestion de l’espace public et du logement ?
- Comment les résidents réagissent-ils aux effets de la migration et du tourisme sur leurs villes ? Comment différentes initiatives et mouvements sociaux revendiquant le « droit à la ville » se comparent-ils dans diverses localités méditerranéennes ?
- Quels imaginaires de la ville méditerranéenne émergent des politiques officielles et des initiatives locales concernant la migration et le tourisme ?
Méthodologie de recherche :
Smoki Musaraj a l’intention de mener des recherches ethnographiques approfondies dans plusieurs villes méditerranéennes qui ont connu une forte croissance du tourisme et de la migration. Le projet débutera par l’examen de villes plus petites, telles que Saranda (Albanie) pour ensuite s’étendre à des villes plus grandes comme Marseille (France) et Barcelone (Espagne). Cette approche comparative fournira des données qualitatives sur les transformations urbaines, les politiques municipales et les perceptions locales dans ces divers contextes.
Impact et résultats préliminaires :
Les recherches préliminaires à Saranda, en Albanie, ont révélé l’impact profond du tourisme et de la migration sur le paysage urbain de la ville et ses habitants. Les préoccupations concernant le tourisme de masse et la construction spéculative entraînant la délocalisation des résidents ont suscité des mouvements sociaux réclamant une planification urbaine équitable. Parallèlement, certaines villes – comme Barcelone – ont accueilli les migrants et les réfugiés, les intégrant à la communauté méditerranéenne.
Pour l’avenir, le projet de recherche explorera la manière dont les gouvernements locaux et les communautés abordent les défis posés par le tourisme et la migration. En analysant les politiques officielles et les initiatives locales, Musaraj vise à identifier les visions émergentes de la ville méditerranéenne, caractérisées par un cosmopolitisme ancré dans les aspirations populaires plutôt que dans l’influence des élites coloniales.
Biographie
Smoki Musaraj est professeur agrégé d’anthropologie à l’Université d’Ohio, aux États-Unis. Elle est née et a grandi à Tirana, en Albanie. Elle a poursuivi ses études de premier cycle à l’Université Trent, au Canada, et a obtenu une maîtrise en sciences politiques ainsi qu’un doctorat en anthropologie à la New School for Social Research, à New York, aux États-Unis. De 2012 à 2014, elle a été chercheuse postdoctorale à l’Institute of Money, Technology, and Financial Inclusion de l’Université de Californie, à Irvine.
L’expertise du Dr. Musaraj se concentre sur l’anthropologie économique et juridique. Au cours des quinze dernières années, elle a mené des recherches ethnographiques dans différentes régions de l’Albanie. Son premier livre, « Tales from Albarado: Ponzi Logics of Accumulation in Postsocialist Albania » (Cornell 2020), retrace comment une douzaine de schémas de Ponzi ont émergé et se sont répandus en Albanie, comment ils ont été légitimés par les institutions étatiques et les représentations médiatiques, et comment des personnes de divers milieux ont investi leurs économies, leurs envois de fonds et leur logement dans ces schémas. Le Dr. Musaraj a également mené des recherches et publié divers articles et chapitres qui examinent les mesures et les représentations de la corruption en Albanie et en Europe du Sud-Est de manière plus générale. Elle a coédité plusieurs ouvrages collectifs portant sur les thèmes de la finance numérique et de l’inclusion financière, ainsi que sur les transformations néolibérales dans l’espace post-communiste.
Smoki Musaraj parle couramment l’anglais et l’albanais, et elle a une bonne maîtrise du français, de l’italien et de l’espagnol. Actuellement, Smoki Musaraj réside à Columbus, dans l’Ohio, avec son mari et sa fille.